Game Story, une histoire du jeu vidéo

Mise en place au Grand Palais, l’exposition Game Story (organisée sous l’égide de MO5) a été un franc succès. Celle-ci permettait au visiteur de jouer à plusieurs dizaines de bornes de jeu. De Pong à Crysis 2, nombreux étaient les jeux cultes dans lesquels les plus nostalgiques ou les simples néophytes pouvaient se plonger. Super Mario, Sonic, Space Invaders, Streets of rage, tous ces titres incontournables étaient ainsi à portées de doigts. Axée sur le registre de la pratique du jeu vidéo et n’omettant aucun des grands classiques de ce domaine, cette exposition n’en omettait pas pour autant d’exposer des consoles et des jeux ayant laissé leur empreinte de façon plus ou moins indélébile dans le domaine vidéoludique.



         



Avec Game Story, Une histoire du jeu vidéo, on est en présence du catalogue de l’exposition. Ce livre vise bien évidemment à retracer l’histoire du jeu vidéo et à en présenter les codes etles éléments fondamentaux qui, selon les auteurs, se décompose en trois parties majeures : 1)le gameplay, 2)l’univers proposé, 3)l’esthétiques choisie.
« La notion de culture est au cœur de cette exposition. » On ressent très rapidement cette volonté d’inscrire le jeu vidéo au panthéon culturel comme étant un de ses acteurs incontournables, sentiment partagé tant par l’ensemble de la communauté vidéoludique que par certaines autorités qui tendent à désamorcer la politique de diabolisation à laquelle l’univers du jeu vidéo a été assujettie ces vingt dernières années (on peut songer aux propos élogieux de Frédéric Mitterrand à l’égard du jeu vidéo, ou encore à l’ouverture du musée du jeu vidéo en 2010 à l’Arche de la Défense, même s'il a fermé depuis). Seulement, à la lecture du début de cet ouvrage on a parfois l’impression que les auteurs veulent à tout prix en faire un objet culturel, quitte à en travestir certains codes ou interprétations, notamment lorsque les auteurs traitent de la tangibilité du jeu vidéo (ce qui reste très discutable) ou encore, lorsqu’ils évoquent la mort dans le jeu vidéo et qu’ils considèrent que « contrairement à ce qui est souvent dit, le jeu vidéo a plutôt trait à la vie éternelle qu’à la mort », éludant de fait le véritable problème posé depuis toujours dans ce domaine et présent aujourd’hui plus que jamais, à savoir la violence.


Dans un premier temps, ce catalogue tisse donc une histoire du jeu vidéo qui est aussi accessible pour les profanes que pour les spécialistes en la matière. Game Story montre ensuite une de ses principales qualités lorsqu'il est fait référence au cinéma ou à la science fiction (space opéra, univers post-apocalyptique). Une mise en paralèlle est ainsi faite entre la science-fiction et le jeu vidéo, présentant, dans un spectre plus large les éléments de fantastique ou de fantasy que l'on peut retrouver dans le domaine vidéoludique. Le choix des auteurs est de clairement mettre en lumière les relations qu'entretien le jeu vidéo avec la pop-culture.






Ce rapprochement effectué entre culture et jeu vidéo est maintenu lorsqu'il est question de présenter les consoles. Car lorsqu'il s'agit de traiter l'"objet" jeu vidéo, les auteurs ont pris le parti de découper ses plus illustres représentants en fonction des différentes génération de console, ce qui, dans un soucis de lisibilité, semble logique. Ainsi, lorsqu'il est question de la parution de la Playstation, et de la seconde moitié des années 90, les auteurs ne manquent pas de faire références à la sortie de Princesse Mononoke de Miyazaki (sorti en 1997), à celle de Matrix, ou encore à l'apparition de Naruto au pays du soleil levant. De la sorte, l'ouvrage déborde sur le domaine de l'art ludique (cf. l'ouvrage de J-S Kriegk et J-J Launier) tant dans un soucis d'élargissement cuturel que de contextualisation des évolutions menées par le jeu vidéo. Pour chacune des périodes abordées, une courte sélection de jeux vient appuyer l'historique. Si les jeux présentés sont dans leur ensemble assez fidèles à ce qui se fait de plus culte en la matière et que les screenshots sont de bonne qualité, on peut déplorer le fait que ces derniers ne soient pas plus imposants ou nombreux afin de pallier les textes trop laconiques.


Dans l'ensemble, Game Story reste un catalogue de qualité et un livre intéressant pour quiconque s'intéresse à l'histoire des jeux vidéos. Cependant, il réussit aussi à dépasser le simple carcan vidéoludique et permet une transposition de ce domaine à l'ensemble de la culture contemporaine.






La revue Trois Couleurs propose, quant à elle, un numéro spécial sur cet événement et profite ainsi de dresser une approche très personnelle de l’histoire des jeux vidéo. Ce numéro s’intitulant  Games Stories, L’histoire secrète du jeu vidéo donne d’ailleurs le ton en la matière. Déjà responsable d’un hors série consacré à Stanley Kubrick, la revue de MK2 remet ainsi le couvert en changeant radicalement de thématique.  A travers ce numéro, on retrouve une traditionnelle petite histoire du jeu vidéo à travers les générations de machines, agrémenté d’un nombre considérable d’illustrations de qualité. Photographies de console, screenshots et autres publicités d’un autre âge, la revue n’est pas avare en la matière.

Games Stories propose également des travaux artistiques basés sur le jeu vidéo. Par exemple, le photographe Robbie Cooper montre à travers certains de ses clichés, l’état hypnotique dans lequel les enfants peuvent être lorsqu’ils sont rivés devant leur écran, manette en main ; dans un autre domaine l’italien Franck Russo propose un détournement des codes de certains jeux pour produire ce qu’il appelle des Minimal Videogame Posters, images faisant également office de devinette pour les joueurs les plus érudits. Outre cela, cette revue propose une interview décalée sur l’univers de RockStar, ainsi que des articles sur le jeu en réseau, la triche, le rétro-gaming ou encore sur l’énigmatique rapport entre le septième art et le jeu vidéo. En bonus, cet ouvrage propose une ludothèque idéale ainsi que tous les goodies, gadgets et autres films ou livres indispensables pour être un bon geek. Ajoutez à cela un poster sur la généalogie des consoles et une direction artistique de qualité et vous obtenez une très bonne revue. Et le tout pour une somme modique, que demander de plus ?

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